Vote "réservé" sur le projet de fonds de péréquation dans le secteur pétrolier.

VOTE "RESERVE" SUR LE PROJET DE FONDS DE PEREQUATION DANS LE SECTEUR PETROLIER

Un projet de texte pour régler un contentieux entre pétroliers

Aujourd'hui, la Nouvelle-Calédonie compte 3 opérateurs pétroliers : Total Energies, Mobil IPC et la SSP (Société des Services Pétroliers). Lorsqu'on analyse la répartition des prix de l’essence et du gazole on y trouve notamment cette mention "produit d'activité grossiste" ou PAG qui désigne le revenu des opérateurs pétroliers pour leurs activités de stockage. Ce PAG comprend deux composantes : un revenu au titre de l’investissement et un revenu au titre de l’exploitation. Afin que chaque opérateur perçoive un revenu qui correspond aux investissements qu’il a réellement effectué, un mécanisme de péréquation est mis en œuvre entre les acteurs. Un arrêté de septembre 2018 prévoit ainsi que des flux financiers sont versés par les opérateurs ayant le moins investi à ceux ayant le plus investi.
Or, la société des services pétroliers (SSP) n’a jamais versé ces flux à ses confrères et doit donc 331 millions de F.CFP à Mobil et 28 millions de F.CFP à Total Energies.
L’opérateur a contesté, sans succès,  devant le Tribunal Administratif en 2018 puis devant la Cour administrative de Paris en 2019 la légalité de l'arrêté n° 2018-2365/GNC du 25 septembre 2018, qui prévoit notamment les modalités de calcul du flux de péréquation du revenu d'investissement.
Actuellement le pourvoi est au stade d’admission en Cour de Cassation.
En parallèle, la société Mobil a introduit plusieurs demandes devant le tribunal mixte de commerce afin d’obtenir le versement par la SSP, des flux de péréquations correspondant aux années 2018 à 2020. Elle a pour le moment obtenu gain de cause pour l’année 2018 mais la SSP a fait appel du jugement du tribunal mixte de commerce.
Toutefois, ces procédures sont actuellement suspendues puisque la Cour d'appel et le tribunal mixte de commerce ont sursis à statuer dans l'attente de l'issue du recours portant sur la légalité de l'arrêté n° 2018-2365/GNC du 25 septembre 2018 devant la juridiction administrative.
Du côté du Gouvernement, au regard de la rédaction actuelle des textes, il ne dispose d'aucun moyen pour obliger le versement des montants dus entre les opérateurs. Il s’agit d’une créance entre deux personnes privées, que seule la juridiction civile peut contraindre la SSP à honorer.
Dans le but d'éviter le renouvellement d’une telle situation, le Gouvernement propose de faire évoluer la délibération modifiée n°173 du 23 mars 2006, en créant un fonds au travers duquel transiteraient les flux de péréquation au titre des investissements. Ce fonds, géré par la Nouvelle-Calédonie, constituerait un intermédiaire entre les opérateurs pétroliers afin d'éviter qu'ils n'aient à se verser ces sommes directement entre eux. Un opérateur qui aurait perçu trop de revenus sur un exercice, verserait ainsi le surplus de revenus au fonds. À l’inverse, le fonds verserait à l’opérateur son manque à gagner sur l’exercice précédent.
Cette gestion au travers d'un fonds présenterait l'avantage de préserver les opérateurs pétroliers en cas de défaut de paiement d'un de leurs confrères et permettrait à la Nouvelle-Calédonie d'émettre un titre de recettes pour remédier à ces situations. Ce projet de texte prévoit des pénalités pour les opérateurs qui n’honoreraient pas leurs obligations de paiement dans les temps.

Vote "réservé" et recommandations du CESE
 

Lors de la séance plénière, le CESE a rappelé que l'institution, en 2018, avait déjà eu à se prononcer sur un texte similaire et que, comme cela avait été le cas il y a 5 ans, le CESE avait pointé le manque de transparence des acteurs pétroliers. A l'origine : l'absence de comptes déposés à la DAE (Direction des Affaires Economiques), éléments pourtant nécessaires pour travailler sur le dossier.

Le CESE pointe par ailleurs, la limite du système prévu dans le projet de texte et s'oppose à ce que la NC se porte garante dans le dispositif de transfert des flux financiers.

Sur les stocks stratégiques, la réglementation prévue par le code de la défense oblige les opérateurs à constituer des stocks stratégiques. Il s’avère que les opérateurs ne s’imposent pas les mêmes obligations puisque pour l’instant l’Etat ne sanctionne pas le non-respect de cette réglementation. Toutefois, la politique interne de Mobil les contraint à la respecter strictement ce qui n’est pas le cas des deux autres pétroliers.

Discuté  puis débattu âprement pendant les auditions au siège du CESE, le projet de texte a fait l'objet de 4 recommandations :

  • Recommandation n°1 : Appliquer les sanctions qui s’imposent aux opérateurs pétroliers, voire les durcir, concernant le non-respect de l’obligation de dépôt de leurs comptes.
  • Recommandation n°2 :S’assurer juridiquement que l’un des opérateurs ne puisse pas se retourner contre la Nouvelle-Calédonie pour obtenir le versement des flux financiers en cas de non-disponibilité des fonds.
  • Recommandation° 3 : Le système ne paraissant pas légitime pour tous les opérateurs, proposer un nouveau système dans un délai de deux ans qui : évite les flux financiers entre opérateurs, dont les investissements éligibles servent l’intérêt général, rémunère les opérateurs au prorata des investissements réalisés,dans un plafond déterminé par le système tarifaire.
  • Recommandation n°4 : Prévoir des sanctions pour les opérateurs qui ne respectent pas l’obligation de stockage stratégique.

Après une heure de séance, les conseillers ont procédé au vote :  "avis réservé" à la majorité sur le projet de délibération portant modification de la délibération modifiée n°173 du 29 mars 2006 relative à la structure des prix de l’essence et du gazole. L’avis de la commission a été adopté à l’unanimité des membres présents et représentés par 31 voix « pour ».